GROUPEMENT BELGE DE LA PORTE OUVERTE

pour l'émancipation économique de la travailleuse

Bulletin d'août 2003

Périodique mensuel d'information et d'opinion féministe; les articles signés n'engagent que la responsabilité de leur-s auteur-e-s).

Il n'y aura pas de réunion publique en août. Mais nous vous demandons de retenir
provisoirement et sous réserve le jeudi 11 septembre 2003 à 19H.

ÉDITORIAL : RÉFLEXIONS FÉMINISTES APRÈS UN DISCOURS ROYAL.

A l'occasion de la fête nationale et du dixième anniversaire du règne, le roi Albert II a prononcé un discours au sujet duquel je désire faire quelques réflexions féministes.

Ce discours de circonstance ne pouvait être un catalogue exhaustif des situations pénibles qui affectent tant de groupes de notre population.

Le Roi, évoquant le passé, a rendu hommage à son prédécesseur, son frère, sans rappeler l'injustice faite à leur soeur aînée, écartée du trône en raison de son sexe par une disposition constitutionnelle modifiée sous le règne du roi Baudouin, ce qui permet désormais à la fille et à la petite fille du souverain d'accéder au trône à leur rang.

Le Roi a appelé les habitants du pays à se préoccuper du sort des populations vivant au sud de la planète et a attiré l'attention sur la «condition souvent inéquitable» des femmes de ces régions.

Dans cet ordre d'idées, il faut souligner que la première étape est de faire cesser les discriminations de sexe/genre faites aux femmes étrangères résidant ici, en raison du statut personnel qui leur est fait dans leur pays d'origine et qui leur est appliqué ici.

C'est d'ailleurs la population féminine toute entière du pays qui est le groupe le plus affecté par une discrimination. Il faut y mettre fin ici et ailleurs, par priorité parce que la discrimination de sexe/genre est globale et résulte de lois ou de mesures officielles ouvertement discriminatoires ou de préjugés ou encore de discriminations indirectes.

La première défense des femmes est leur émancipation économique en priorité par l'augmentation du nombre de femmes ayant des ressources individuelles, notamment par l'activité professionnelle et la solidarité générale.

Nous rappelons la résolution que le Groupement belge de la Porte Ouverte a adopté lors de son assemblée générale du 25 février 1999, dans laquelle il était demandé aux autorités compétentesd'établir immédiatement un inventaire complet de toutes les discriminations fondées sur le sexe qui affectent les femmes, dans le but de les faire cesser.

A.H.

UN JALON DANS LE FÉMINISME

Il est dû au courage et à la persévérance de quelques unes. Oui, l'action des hôtesses de l'air de la SABENA restera dans l'histoire comme la grève des ouvrières de la F.N. de Herstal.

C'est la raison pour laquelle nous revenons sur la séance du 28 juin 2003. Révélons, si nécessaire, le nom de l'héroïne du jour  : Madame Marie-Thérèse Cuveliez, avocate, que nous n'avions pas mentionné par discrétion afin que cet hommage demeurât une surprise pour l'intéressée.

Dans le numéro précédent, nous avons mentionné les discriminations de sexe/genre dont étaient victimes les hôtesses de la SABENA.

La présidente de la BCFH (Belgian Corporation of Flying Hostesses) relata la longue lutte de ces femmes qui combattirent sous des formes multiples. Il y eut des manifestations à l'aéroport national, des articles de presse, des actions de sensibilisation du public, la perturbation de la fameuse et dégradante «commission esthétique», etc... Il y eut aussi la lutte sourde et patiente dans les organes de négociation, et les contacts avec l'employeur et les syndicats.

Ce fut possible grâce à l'analyse intelligente et compétente que Marie-Thérèse Cuveliez fit des textes juridiques et grâce à son étude des possibilités de recours. Il y eut l'action devant les juridictions qui allèrent de pair avec la persévérance de celles qui osèrent «se mouiller». Soulignons le désintéressement de celle qui conseilla le groupe et les sacrifices financiers qu'impliquent les frais de justice.

Rappelons le licenciement immédiat d'une hôtesse qui refusa de se soumettre au jugement de la «commission esthétique».

Finalement les arrêts de justice mirent fin à l'affaire théorique, mais elle garde évidemment des prolongements pour les intéressées. Madame Van Hemeldonck, ancienne députée européenne rappela à juste titre que l'audace de quelques unes a fait établir une jurisprudence qui vaut maintenant à l'échelle de l'Union européenne.

L'affaire des hôtesses de l'air de la SABENA demeure un exemple à suivre.

ICI ET AILLEURS

Nous ne dirons pas que le violence à l'égard des femmes, notamment dans le milieu familial, est un sujet à la mode parce qu'on en parle beaucoup; nous disons plutôt qu'on finit par en parler.

Telle avocate d'ici se déclare atterrée par les situations qu'elle découvre dans les dossiers qu'elle traite. Tel(le) assistant(e) social(e) qui travaille dans le milieu scolaire constate l'incidence de cette violence sur les résultats obtenus par les enfants.

L'une et l'autre constatent que cette violence est particulièrement répandue et durable lorsque la victime se trouve dans une situation de dépendance économique à l'égard de l'auteur des violences.

Et la situation est la même à des milliers de kilomètres d'ici ainsi que le mentionne sans ambages le très officiel rapport du gouvernement du Bhoutan aux Nations Unies (réf  : CEDAW/C/BTN/1-3). Dans ce pays himalayen (capitale Thimbu; 1,5 fois la Belgique; 1,5 million d'habitants) l'emploi des femmes est réduit, la violence à leur égard est répandue, bien que les plaintes soient rares en raison du manque d'intérêt de la police et la crainte de représailles.

«En règle générale, il semble que les femmes qui ont une activité professionnelle et sont indépendantes financièrement demandent le divorce, tandis que les mères au foyer dépendant économiquement de leur mari préfèrent continuer à subir de mauvais traitements.» (p.70).

On a récemment entendu dans notre pays une chanteuse malgache qui, elle aussi, dénonce la condition de dépendance des jeunes peu instruites qui vivent isolées dans les régions rurales du pays sans pouvoir se libérer de la polygamie, de la dépendance économique et de la violence qui en résulte.

REPARLONS DE LA DISCRIMINATION DE SEXE/GENRE

C'est un sujet essentiel parmi les préoccupations du mouvement féministe. Un vent favorable a fait connaître à certain(e)s, notamment au Lobby Européen des Femmes, le texte d'un projet de directive européenne sur cette discrimination en dehors des questions relatives à l'emploi et à la profession. C'est un document confidentiel, dont nous n'avons pu obtenir le texte. L'analyse du LEF montre que ce texte a le mérite de citer des situations que d'aucuns appelleront «mini-discriminations» qui surgissent dans la vie courante et qui affectent les femmes (prix variables de certains services selon qu'ils sont achetés par des hommes ou des femmes). La révolte des femmes contre ces «menus faits» n'est pas plus ridicule que le «petty apartheid» dont se plaignaient certaines populations en Afrique du Sud, et qui, pourtant, a soulevé l'indignation internationale.

RÉFLEXIONS À PROPOS DE L'ACTUALITÉ

 - On sait que l'année 2003 a été proclamée «Année européenne des handicapés». A cette occasion, le NVR (Nederlandstalige Vrouwenraad) consacre le numéro du deuxième trimestre de sa revue, à la question des femmes handicapées.

Il y propose de l'information, des réflexions et aussi de précieux témoignages de femmes (dont celui d'une mandataire politique) qui, handicapées, ont atteint une intégration remarquable. Ces témoignages sont aussi des exemples.

Il est, en effet, d'une importance capitale, que les perspectives présentées aux fillettes et aux femmes handicapées ne se limitent pas au cercle familial mais qu'elles englobent aussi l'horizon professionnel et l'ambition sociale.

 - C'est, à notre connaissance, la première fois qu'une femme devient la présidente d'un Conseil provincial de l'ordre des médecins  : docteure Béatrice Collet, à Namur, alors que cette institution fonctionnne en Belgique depuis 1948, que la première Belge à devenir médecin, Isala Vandiest, a obtenu son diplôme (à l'étranger ) en 1877. Il est long le cheminement des femmes vers les honneurs professionnels.

Nous relevons aussi, dans l'interview, que la docteure B. Collet (Le Généraliste, juin 2003; n° 648) mentionne qu'elle a, dès le début, orienté sa carrière en tenant compte de ses impératifs familiaux.

 - Il convient de garder la tête froide devant les opinions et appréciations exprimées par certains, qu'ils soient professionnels (journaliste, par exemple) ou non.

Pendant la campagne électorale, on a parlé de la «féminisation» et du rajeunissement du futur parlement et du futur gouvernement. Et un organe de presse déclarait vouloir des ministres «jeunes et jolies» (au féminin).

Nous éviterons de lui faire de la publicité, et nous ne citerons pas l'auteur.

Nous pensons qu'il n'y a pas eu de journal pour réclamer des ministres «jeunes et jolis» (au masculin), ce qui aurait pu se rapporter aux personnes des deux sexes. Heureusement, quelques jours plus tard, «Het Laaste Nieuws» (10 juillet 2003) réparait cette appréciation en consacrant un article élogieux à diverses candidates et en l'intitulant: «bekwaamheid is belangrijker dan sekse» (la compétence est plus importante que le sexe).

Notons pourtant que cet article est surmonté de deux grandes photos de politiciens masculins!

© Porte Ouverte 2007

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