GROUPEMENT BELGE DE LA PORTE OUVERTE

pour l'émancipation économique de la travailleuse

Bulletin d'octobre 2002

Périodique mensuel d'information et d'opinion féministe; les articles signés n'engagent que la responsabilité de leur-s auteur-e-s.

Conférence sur la base de donnée DIGMA

Nous vous invitons, ainsi que les personnes de votre entourage familial et professionnel à la conférence de Madame Ariane Dierickx, licenciée en Histoire Contemporaine et directrice adjointe d'Amazone au sujet de DIGMA (Database of Instruments for Gender Mainstreaming), la banque de données sur les questions de genre, que nous organisons le jeudi 24 octobre 2002 à 19h dans une des salles d'Amazone, rue du Méridien, 10à 1210 Bruxelles

Le comité espère que nombreuses seront les personnes qui y participeront et qui contribueront ainsi à faire progresser l'émancipation économique de la travailleuse.

L'oratrice, outre les titres mentionnés plus haut, a une très sérieuse formation en informatique; la gestion de la banque de données DIGMA et ses fonctions à Amazone, lui donnent une grande compétence pour aider les personnes qui désirent s'informer sur les questions de genre dans leur ensemble, tant théoriques que pratiques.

Petit lexique

  • «Database» signifie «banque de données».
  • Le mot «sexe» concerne les caractéristiques physiques et biologiques des personnes.
  • Le mot «genre» concerne la situation des personnes des deux sexes dans la société.
  • L'expression «MAINSTREAMINGDU GENRE» peut être traduite comme l'intégration de la notion de genre dans toutes les questions.
  • Le terme «EMPOWERMENT» concerne la prise de pouvoir sur soi-même et sur les circonstances et la société, ainsi que l'acquisition d'un pouvoir de décision.

Un coup de projecteur sur une profession: médecin

Le retentissement dans les médias qu'a eu la publication des statistiques concernant cette profession nous amène à en parler assez longuement. En effet, la presse n'a pas manqué d'en faire de grands titres, comme La Libre Belgique des 3 et 4 août 2002 avec «Dix fois plus de femmes médecins qu'il y a trente ans» en première page.

Ce que l'on souligne dans les commentaires, ce n'est pas seulement l'accroissement de la proportion des femmes dans le métier, mais leur pénétration dans tous les secteurs et spécialisations; mais on souligne aussi qu'elles sont majoritaires à commencer les études ou à exercer les spécialités peu rémunérées (dermatologie ou anatomie pathologique par exemple), qui ont un rendement financier modeste.

Observation un peu étrange: elles sont loin d'être majoritaires en obstétrique?Quant à la hiérarchie dans l'enseignement ou à l'hôpital, il y a certes des femmes depuis plus de soixante ans, -comme le rappelle dans «semper» (revue médicale) la professeure M. De Rood, qui fut en son temps désignée comme «femme de l'année»-, mais leur proportion est moindre qu'à la base.

Sans doute ne manquera-t-on pas de dire qu' «il faut du temps!». On ne manque pas non plus de souligner que les femmes auraient tendance à consacrer plus de temps à chaque prestation que les hommes, et à se contenter d'horaires de travail moins chargés, ce qui, à plus ou moins long terme, aurait pour effet de créer une pénurie de prestataires.

Autrement dit, «la place des femmes» alimente l'argumentation dans les disputes au sujet des diverses conceptions de la pratique professionnelle. Enfin les femmes interviewées déclarent leur gratitude aux membres de leur entourage qui les libèrent des charges ménagères et familiales.

Témoignages

Quelques témoignages retracent des situations auxquelles des femmes médecins ont dû faire face à une époque assez récente:

  • «A l'Université de Liège, à cette époque, le professeur B. était titulaire de la chaire d'obstétrique. C'était la clinique de manœuvres obstétricales; dans la salle pleine, les étudiantes étaient clairsemées; l'éminent pédagogue, voulant démontrer un exercice difficile mais ignorant manifestement la longue tradition des remarquables obstétriciennes qui l'avaient précédé auprès des parturientes, brandissait un forceps ou quelque autre instrument en proférant superbement que les femmes peuvent bien être accoucheuses, mais qu'elles ne peuvent pas être médecins accoucheurs. Et de fait il n'y avait aucune assistante dans son service. Nous les quelques étudiantes présentes, protestâmes en silence en frottant les pieds sur le sol». Docteur X
  • «C'était pendant la guerre 40-45, il y avait des bombardements sur Bruxelles. Pour renforcer leurs services dans ces circonstances, il fut décidé par les chefs de service que les stagiaires devraient au plus tôt, dans ce cas, rejoindre l'hôpital. Quand cette décision nous fut communiquée, et que ledit chef de service eut quitté le local, quelques étudiants en mal de «galanterie» déclarèrent que les filles devraient être dispensées de cette obligation. Sentant bien l'astuce, et la volonté que nourrissaient quelques machos (le terme n'était pas utilisé à cette époque) de se réserver le bénéfice d'une expérience professionnelle supplémentaire, nous, les filles, fûmes unanimes à refuser cette «dispense» et l'affaire en resta là». Docteur N.
  • «Je venais d'obtenir mon diplôme de médecine et mes études avaient été brillantes; Ce vieux médecin, ami de la famille, me félicite, me disant: «vous pouvez envisager de devenir adjoint des hôpitaux». Je ressentis immédiatement la restriction! Je me demande encore s'il savait que la réussite professionnelle et sociale dépend en (grande) partie des attentes manifestées par l'entourage et la société.» Docteur Z.
  • Sans remonter à ces époques relativement lointaines, nous lisons, dans une revue médicale de cette année 2002, le témoignage d'une consœ ur qui explique que,»spécialisée en chirurgie, elle ne trouva pas d'emploi dans l'hôpital de sa région et dut se contenter d'avoir à pratiquer la «petite chirurgie» en privé».

En quête de travail

L'Union Européenne veut mener une politique d'emploi et réaliser la mise ou le maintien au travail de personnes actuellement sans emploi, tandis que divers secteurs d'activité sont, chez nous aussi, à la recherche de travailleurs - et donc également des travailleuses.

Le Conseil supérieur de l'Emploi vient de publier son rapport annuel et a examiné notamment la structure de la population féminine du pays. Il constate que douze pour cent des femmes âgées de 25 à 44 ans ont des tâches ménagères et familiales comme principale occupation, et que leur degré de qualification est faible.

Entre 40 et 45 ans, 25 pour cent des femmes ayant peu de qualifications sont au foyer, alors que celles qui ont une formation moyenne ou supérieure ne sont que 11 pour cent.

Une campagne est menée par le ministère fédéral pour démontrer que les femmes «conviennent» aux emplois dits masculins (notamment affiches dans le métro), et SOFFT -Service d'Orientation pour Femmes à la recherche d'une Formation ou d'un Travail- a mené l'enquête à Liège et publié une brochure intitulée: «pourquoi pas elles dans ces métiers-là?».

Dans des secteurs où l'on cherche du personnel, les employeurs font parfois appel à un groupe social précis, mais nous avons remarqué que, dans une interview à la radio RTBF, le chef d'état-major de l'armée a ouvertement fait appel aux personnes d'origine allochtone, mais n'a pas une seule fois parlé des femmes dans les fonctions militaires. C'est à croire que les femmes sont des êtres transparents!

Mais l'on peut dire qu'il y a des femmes au travail partout; parmi les dix pour cent de salariés travaillant régulièrement le dimanche (santé, horéca, etc?), il y a une proportion égale d'hommes et de femmes. Et, le samedi, il y a davantage de femmes au travail (25%) que d'hommes (20%), notamment en raison de leur présence dans le secteur de la distribution.

Étude de l'UCL sur l'accès des femmes à l'Université

Cette étude, nous dit-on, souligne l'incidence de la situation sociale et financière des familles, et celle du niveau d'études des parents. Soulignons bien le mot «parents», car dans les commentaires verbaux qui ont été faits à la radio, et lors d'une séance de rentrée, cette expression est devenue: «niveau d'études du père», ce qui lors de ladite rentrée académique a suscité quelques grimaces parmi les auditrices présentes. Une fois de plus, c'est le père qui est présenté comme celui qui donne un standing à la famille, alors qu'on ne manque pas d'éloges pour souligner le rôle de la mère dans l'avenir des enfants quand il s'agit de l'inciter à renoncer à «être aussi à elle-même».

Dans le même temps, le journal De Standaard souligne que, dans l'enseignement fondamental, il n'y a plus qu'un homme sur cinq enseignants.

© Porte Ouverte 2002

Haut de la page